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De l’Argentine à l’Islande puis jusqu’à l’Afrique du Sud, un raid de 43.000 km en ULM (1999) [vidéo]

 

Le 27 novembre 1999, le Suisse Olivier Aubert et le Sud-africain Mike Blyth se posent au Cap (RSAF) avec leurs ULMs pendulaires. Ils sont partis 8 mois plus tôt du bas de l’Amérique du Sud, remontant vers l’Amérique du Nord jusqu’au Groenland, puis traversant l’Atlantique et redescendant de France vers l’extrémité de l’Afrique du Sud. C’est un exploit, après un périple de 43.000km, que personne n’avait encore réalisé avec n’importe quel type d’aéronef ! Baptisé "South to South", ce raid en étapes reste la plus longue expédition réalisée en ULM !


Olivier Aubert sur son DTA à l’approche du Groenland 4 mois après avoir quitté l’Argentine.

Pourquoi ne pas faire deux fois mieux que le raid de 1995 ?

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L’itinéraire de "South to South".

Après leur expédition commune de 1995 (Voir :Récit) Olivier Aubert et son ami Mike Blyth ont préparé un raid exceptionnel : Traverser les 2 ou 3 Amériques, l’Atlantique, notre vieux continent et l’Afrique. Réaliser un voyage en étapes 2 fois plus long que le précédent, toujours à bord de leurs appareils, des ULMs pendulaires ! Sans trouver d’aides numéraires importantes, ils se lancent dans l’aventure confiant dans leur matériel et leurs capacités mentales et physiques. O.Aubert investit ici tout l’argent des derniers safaris touristiques qu’il a mené en Namibie.

Ils débarquent à Buenos-Aires avec leurs 2 ULMs en soute. L’idée de démarrer d’Ushuaia, à l’extrême sud du continent est abandonnée car 6.000$ sont nécessaires pour les y transporter par la route avec leur matériel. Quant aux appareils, ce sont les mêmes que lors du raid précédent, mais les moteurs sont neufs, les ailes aussi, et quelques améliorations ont été apportées depuis 4 ans. Le départ s’effectue de l’aérodrome de Rodriguez, dans la banlieue de Buenos-Aires le samedi 27 mars 1999. Ils se dirigent alors vers le Chili.

Du sud au nord, l’hospitalité américaine à géométrie variable.

Déjà un front d’orage les oblige à atterrir 300km plus loin, sous une pluie battante, entre vaches et moutons. Toutes les affaires sont trempées et ils passent leur 1e nuit dans des sacs mouillés. Le lendemain ils se posent à Santa Rosa de la Pampa. Il y a foule, la TV est prévenue, le club les déclare invités d’honneurs et des gosses demandent des autographes. Au pied des Andes, à San Carlo de Bariloche, un bureaucrate lance la 1e embûche : ils ne sont pas autorisés à entrer au Chili. Les choses s’arrangent heureusement et ils grimpent à 4.000m au-dessus des Andes. La chute de Guillaumet revient en mémoire dans cet air glacial et ce paysage magnifique qui mérite la photographie. Mais il faut sortir de là. Enfin le Pacifique brille dans le lointain, c’est la descente et le contact avec des gens agréables. Puis, pendant des jours, ils foncent le long d’une côte interminable et arrivent dans le désert d’Atacama, splendide comme tous les déserts du globe. Jusque là les vols se sont plutôt bien déroulés, la confiance règne.

Deux jours plus tard, à Tacna, les Péruviens exigent une caution de 3.000$ dollars par appareil pour les laisser poursuivre le périple sur leur pays. Il faut 5 jours de négociations pour éviter de payer la somme. Puis les vols reprennent sur un paysage magnifique, malgré l’interdiction du survol des ruines de Machu Pichu. Laissant les ULMs à Lima ils font une visite touristique à Cuzco via un vieux B-727. Dix jours plus tard ils arrivent au Guayaquil International Airport et ne peuvent éviter la taxe d’atterrissage de 100$ par appareil. Ils passent l’équateur pour la 1e fois et filent vers la Colombie. Ayant tout entendu sur les dangers de ce pays ils ne veulent pas le contourner et croisent vers Tumaco. Le 10 mai, après 8.500 km ils sont à Cali en pleine zone de la drogue. Un 1e atterrissage erroné s’effectue sur un terrain hélas militaire. Ils remettent les gaz à fond mais on envoie un avion intercepteur à leur poursuite qu’ils ont de la peine à lâcher en zigzaguant au ras du sol. Ils atteignent enfin l’aéroport civil ou leur histoire fait rire pas mal de gens dont quelques militaires. La vie nocturne du coin étant très active ils restent là une semaine. Puis, après Panama City, ils se dirigent petit à petit vers le Mexique, survolant Palenque, riches de chauds souvenirs du monde latino-américain.

Aux USA, le règlement évitant au personnel naviguant ou pilote privé d’avoir un visa ne leur est pas appliqué en arrivant à Brownsville (Texas). Un rapide aller-retour s’effectue en voiture au Mexique, à la douane située sur le pont du Rio Grande où ils achètent un visa "automobile" pour 20$ et peuvent ainsi redécoller. Entre temps ils ont déclaré aux autorités les ampoules de morphine de leur trousse médicale de survie, produit utile en cas de crash dans une nature hostile. Les tampons colombiens de leurs passeports énervent parfois la douane mais sans effet négatif après le contrôle de leur matériel. Escales à New Orleans, Kitty Hawk, puis le 4 juillet ils survolent New-York et tournent 3 fois autour de la Statue de la Liberté puis continuent vers Québec après un survol des lacs du Maine.

Ils volent près de 5h par jour essayant d’être au point nord de leur périple avant la mauvaise saison. La traversée de l’Atlantique est leur vrai souci et ils en font parfois des cauchemars. Le Canada apparaît extraordinaire mais les conditions de vol y sont moins intéressantes à cause d’une météo imprévisible. En 4 jours ils atteignent la Terre de Baffin (N-Canada). Là, le moteur d’Olivier ne veut pas démarrer à froid, sauf sans son hélice. C’est le réducteur qui coince, il faudra chauffer le tout une heure avant chaque départ à ces latitudes.

Traverser l’Atlantique avec ou sans une couverture d’assurance ?

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Prêt à traverser l’Atlantique depuis le Groenland.

Comme les Danois n’ont pas envie de voir des ULMs traverser l’Atlantique, ils ont inventé une assurance obligatoire au coût exorbitant qui décourage tous les volontaires. Il faut 5 jours de recherche pour trouver une assurance londonienne qui les couvre pour un montant élevé mais dans leurs cordes. Mais lorsque le feu vert arrive de Copenhague, le temps se dégrade subitement, le départ est reporté. Ils tuent alors le temps en compagnie de joyeux Nordiques tout en appelant régulièrement la météo. Cela dure 6 jours avant de retrouver des conditions convenables pour une traversée. Avec 160 litres d’essence à bord, l’autonomie est de 1.200km. Ils enfilent 3 combinaisons de vol, 2 cagoules, etc., pour résister aux 3.000m d’altitude des reliefs groenlandais. C’est ensuite le survol des icebergs du détroit de Davis avec la peur de tomber à l’eau si un moteur s’arrête. Après 6h30’ de vol ils rejoignent la côte ouest du Groenland. Sur place tout est hors de prix, essence, hôtel, mais ils n’ont pas d’autre choix.

Le 6 août, ils réalisent un survol magnifique du Groenland sauvage ou l’on voit à plusieurs centaines de km. C’est la plus belle étape depuis leur départ, mais que l’air est frais durant ces 7 heures ! Pas facile de faire des photos avec des moufles d’Eskimo. Le 7 c’est le départ vers l’Islande constamment à l’écoute du bruit du moteur Rotax et les yeux sur les instruments et la jauge pour ne pas se perdre en mer. Après 8h30’ de vol c’est l’arrivée à Reykjavik. Le 9, après 7 nouvelles heures au-dessus de la mer (880 km), vent dans le dos, ils rejoignent l’Ecosse à Stornoway avec une mauvaise météo à l’arrivée. C’est le grand soulagement, l’exploit et la fête à l’étape. Ils traversent ensuite le pays et sont à Londres où Mike retrouve son épouse venue l’attendre. Les appareils subissent un check-up et tout peut continuer encore. Le limiteur de couple avait causé les problèmes de moteurs d’Olivier dans le froid, c’est corrigé. En France, une fissure du radiateur d’huile sera réparée qui ne s’est heureusement révélée qu’après l’Atlantique !

Jusqu’au Maroc ils emportent des passagers : le fils de Mike et le frère d’Olivier. Le Départ se fait depuis d’Annemasse (74, F), le 9.9.99, proche de la ville natale d’Olivier Aubert, Genève, car la Suisse interdit les ULMs. Quelques escales en France sont obligatoires en raison de l’impact de leur raid sur divers clubs et constructeurs d’ULM. Puis, après Biarritz, c’est l’Espagne, Gibraltar et la descente sur la côte ouest africaine, à l’opposé de leur raid de 1995. S’échelonnent alors les villes de Rabat (Maroc) le 21 septembre, Tombouctou (Mali) avec un Sahara toujours aussi spectaculaire. Puis viennent Libreville (Gabon), le 27, après la traversée d’un orage difficile au Cameroun, et Windhoek (Namibie) le 15 novembre. C’est enfin l’arrivée du raid à Cape Town (Afr. du Sud), la ville de Mike Blyth, le 27 novembre 1999.

Une descente vers l’Afrique du Sud au lieu de rejoindre l’Australie

Ils ont réalisé un parcours exceptionnel de 43.000 km en 8 mois et 460h de vol sur 4 continents et 33 nations tout en traversant deux mers, et cela sans assistance au sol. C’est un nouveau record qui n’avait pas encore été réalisé avec un quelconque aéronef.

On peut imaginer qu’Olivier Aubert et Mike Blyth auraient probablement réussi le pari de rejoindre l’Australie, but initial de ce raid, via le pourtour du Pacifique. Mais, alors qu’ils étaient déjà parti d’Amérique du Sud et volaient en Colombie, ils reçurent une contrainte incontournable des autorités japonaises qui demandaient 25.000$ de droit de passage sur leur pays ! Impossible d’autre part de passer par la Chine interdite aux appareils "subservifs" incontrôlables dans ce vaste territoire. Le raid se modifia donc en cours de route et le retour fut déplacé via l’Atlantique, l’Europe et l’Afrique, ce qui n’enlève rien à l’exploit des 2 pilotes et à leurs capacités d’adaptation.

 

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Olivier Aubert et le DTA survolent la figure du colibri gravée dans la pampa de la Nazca au Chili.
Par : Jean-Claude Cailliez
Le :  lundi 13 février 2006
Extrait du film South to South de O. Aubert et M. Blyth, 1999 (sonore, couleur, 5’25’’, ≈163 Mo), nécessite le plugin QuickTime 7.1.3 minimum. Ne pas hésiter à laisser downloder un peu avant lecture

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