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Louis DEMAUREX (1878-1969) : constructeur puis mécanicien des débuts de l’aviation (1909-1938) [vidéo]

 

Mécanicien automobile, chauffeur, Louis Demaurex débute par le vol de modèles réduits qui lui rapporte un 1er succès (1908). Constructeur d’aéroplane, il teste 2 avions dans la campagne genevoise sans véritable envol (1909-10). Il devient le mécanicien des 1ers pilotes genevois : Wyss, Taddéoli, Durafour, Weber (1911-20). Cela l’amène à entrer à l’aéroport de Cointrin comme le 1e mécanicien d’avion de son histoire (1922). Durant 16 ans, il y voit décoller l’aviation commerciale, offre aux passagers des engins en état de vol ainsi qu’aux membres de l’Aéro-Club.


Louis Demaurex, à gauche, mécanicien de Marcel Weber, à bord d’un Savoia (CH-6) de la Cie genevoise Avion-Tourisme S.A. (1920).

Des modèles réduits aux capacités surprenantes (1907-1909)

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L. Demaurex dans les années 20.

Louis Demaurex naît à Rolle (VD) le 20 décembre 1878 et, après des études modestes, suivra une formation de mécanicien et de chauffeur en automobile. Il est manœuvre à Gilly (VD) lors de son recrutement militaire d’octobre 1897 (taille 1,71m, tour de poitrine 85cm...) et muté dans l’infanterie à Lausanne (matricule G192).

En 1906, il s’établit à Genève à 27 ans et entre au service de M. Sarrasin à Pregny comme chauffeur et mécanicien automobile (1907). Il s’intéresse aux "plus lourds que l’air", probablement influencé par les expériences des frères Dufaux. M. Sarrasin le décourage vivement dans son entreprise affirmant qu’il "poursuit des chimères et que les aéroplanes ne seraient tout juste bons qu’à casser la tête de quelques fous comme lui !"

Demaurex débute par le dessin et la construction de modèles réduits d’avions motorisés avec un élastique et se lie d’amitié avec un autre passionné de Meyrin, Edouard Bueno. Ensemble ils participent au grand concours de maquettes volantes de Nice (F) qu’ils remportent (1ère et 2ème place) devant 50 concurrents. Une des 2 maquettes réalise même un looping (voir : Récit.). Grâce à ce résultat, Demaurex se fait embaucher comme collaborateur aux Ateliers Vosgiens de construction pour la Locomotion Aérienne de Saint-Dié (F). Les deux amis seront à nouveau présent au même concours en 1909, avec les mêmes maquettes, mais ne figurent plus au palmarès et malgré la modeste présence de 23 concurrents. En fin d’années, ils concourent encore au Bâtiment électoral de Genève avec leurs 2 modèles-réduits et parmi 50 autres maquettes.

Constructeur aéronautique entre 1909 et 1910, avec Edouard Bueno

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Le biplan Bueno-Demaurex No1 en 1909.

Les capacités aéronautiques évoluent alors chaque mois, pourquoi n’évoluent-ils plus ? Demaurex et Bueno consacrent tout leur temps libre à la réalisation d’un véritable aéroplane pendant les années 1909-1910. Avec l’aide des Ateliers de Saint-Dié, Demaurex construit son appareil No.1 qui est transporté et remonté à Genève à fin août 1909. D’une envergure de 12 m, le Bueno-Demaurex No.1 est un biplan aux ailes décalées de 3m, dit "canard", d’une surface portante de plus de 50m2, équipé d’une queue avec à nouveau des ailerons. Il est propulsé par un moteur "Lucia" du genevois Picker, de 50cv, propulsif et en place arrière. L’appareil est prévu pour 3 personnes toutes placées à l’avant. Les essais se dérouleront fin septembre à Genthod (GE), avec 2 hélices contrarotatives d’un diamètre de 2,40m (à 600T/m), mais l’appareil de près de 750kg ne décolle pas.

Les deux constructeurs entament alors la construction d’un 2ème appareil biplan qui est terminé en juillet 1910. Une seule hélice se trouve à l’arrière, calée sur un moteur de bateau Lucas de 50cv qui a été allégé aux usines automobiles Sigma de Chêne-Bourg (GE). Demaurex fabrique ses propres hélices et l’une fournit 130kg de traction à 1.000 t/m, l’autre 180kg à 1.150 t/m. A Genthod, les essais de décollage ne sont pratiqués qu’en ligne droite sur un terrain de 600 m de long. Après plusieurs essais, quelques casses et des réparations, le Bueno-Demaurex No.2 décolle de quelques centimètres seulement. Malheureusement il est au bout du champ et les arbres empêchent l’envol. Impact ! Gravement endommagé, le biplan ne peut être réparé faute de fonds propres nécessaires (7 sept.1910).

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Le second appareil de Demaurex à Genthod (1910).

En septembre, on retrouve l’avion, Demaurex et Bueno qui est alors le chauffeur de la famille Scott, de Pregny. Le jeudi 8, derrière le village de Genthod, c’est Albred B. Scott qui est aux commandes emportant Bueno. L’appareil décolle sur une dizaine de mètres, à faible hauteur et à 60 km/h. Mais lors du 1er virage, l’appareil chavire et chute. Les 2 hommes se relèvent sans grand mal. Cette fois-ci, l’appareil est complètement fichu, l’hélice, les ailes sont en miettes. On projette la réalisation d’un nouvel appareil avec un moteur plus léger, toujours sponsorisé par M. Scott.

Buenod et Demaurex dessinent alors cet appareil avec un fuselage fermé protecteur et l’hélice à l’avant mais cessent leurs travaux. D’autres Genevois ont réussi à décoller un avion entre temps : les Dufaux, Carfagni, Speckner, Taddéoli, Audemars, Kimmerling, Wyss, etc.

Mécanicien d’avion des pionniers de l’air genevois et de Cointrin (1911-1938)

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Demaurex sur un hydravion vers 1920.

Louis Demaurex devient alors le mécanicien de l’aviateur Genevois Paul Wyss pour la saison 1911 et va beaucoup voyager (voir : Biogr.). On le voit au meeting de Viry (F) assistant pour l’organisation des vols (avril), au 1er meeting de Lausanne (juin), de Planeyse (juillet). Il est à Valence en Espagne avec Wyss (juillet), au meeting de Dübendorf (août) et de retour à Genève pour le Prix de la Rade (septembre). Puis il deviendrait le mécanicien du Genevois Emilie Taddéoli (voir : Biogr). Hélas, la guerre cloue l’aviation civile suisse au sol jusqu’à l’armistice. Demaurex est probablement mobilisé comme beaucoup durant une longue période. Seuls volent quelques ex-pilotes militaires, comme Marcel Weber qui en ferait son mécanicien en 1918 (voir : Biogr.). En 1919, Demaurex œuvre comme mécanicien de François Durafour sur le terrain de Saint-Georges (GE), puis comme celui de la société Avion-Tourisme SA qui emploie Durafour (voir : Récit.). Il retrouve là d’autres pilotes connus dont à nouveau Weber et Taddéoli et gère une flotte d’hydravions Savoia et un Caudron G3. La société ferme malheureusement ses portes à l’été 1920. Demaurex retourne alors auprès de Marcel Weber.

Heureusement, le champ d’aviation de Cointrin, futur aérodrome et aéroport, est créé à Genève en novembre 1920 (voir : Récit). Son responsable intérimaire est Philippe Latour, le temps de trouver un véritable patron aviateur qui sera Marcel Weber, en juin 1922. Demaurex postule comme mécanicien et gardien du terrain et entre en fonction en août 1922. L’aéroport occupe maintenant 7 personnes ! Demaurex sera bientôt le chef-mécanicien, fidèle, respecté et aimé de tous.. avec beaucoup de caractère. Il côtoiera Walter Borner, Charles Bratschi et bien d’autres. Durant 16 ans il va vivre au cœur des développements de l’aviation commerciale d’avant guerre, de l’avion à 1 passager jusqu’au DC-3 à 15 places. Une équipe de mécanos le secondera. Son activité s’étend aussi aux appareils du Club Suisse d’Aviation, l’aéro-club genevois.

Si son activité est au sol, il est parfois à bord d’un appareil après une réparation. En 1926, le pilote Joseph Thoret (1892-1971) l’emmène survoler le Mont-Blanc et jeter du matériel et des vivres aux soldats français travaillant pour le refuge Vallot (voir : récit). A 60 ans il décide de quitter l’aéroport pour entrer chez Hispano Suiza pour quelques années. Quelle prémonition ou quelle chance ? La guerre va bloquer toute l’activité aérienne de Cointrin alors que les usines d’armement tourneront à plein régime ! Sa retraite sera de longue durée, 25 années, avant son dernier vol le 11 mars 1969, à 90 ans. Ce pionnier genevois méconnu de l’aéronautique avait participé à l’aviation locale dès ses fragiles débuts et connu et servi tous nos pionniers de l’air.

 
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Cointrin années 20s : Marcel Weber (le patron), un mécano, l’apprenti et Louis Demaurex (chef mécano). A gauche, une coque d’hydravion.
Par : Jean-Claude Cailliez
Le :  lundi 13 février 2006
  • Pour plus d’information : Voir Olivier Steinhauser
  • Louis Demaurex (Diaporama, N&B, sonore, 02’13’’, 50Mo), nécessite le plugin QuickTime 7.1.3. minimum.

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