Les 250cv du moteur Hispano-Suiza se démarrent à la manivelle (photo SBO).
Nationalisé en France, Dewoitine et 5 collaborateurs émigrent à Thoune
Nous devons le Dewoitine D.26 à Emile Dewoitine (France, 1892-1979). Il fait partie des pionniers de l’aviation française. Il accomplit ses classes en 1911, travaille comme mécano à l’Ecole Blériot d’Etampes et participe sur biplans Farman à différents raids militaires en Algérie et en Tunisie avant 1914.
Emile Dewoitine prend la direction d’une usine d’assemblage d’avions Voisin à Odessa (Russie) durant la 1ère Guerre Mondiale avant de revenir chez Latécoère à Toulouse après la Révolution russe de 1917. Il y travaille jusqu’en 1920 pour ensuite se consacrer à son compte à l’étude d’avions. En décembre 1924, Marcel Doret, fameux pilote d’essai, établi 3 records mondiaux de vitesse avec le Dewoitine D.1. Dewoitine produit alors des avions de chasse et des avions commerciaux jusqu’en 1936, date de la nationalisation de sa société qui devient la SNCAM. Il émigre alors à Thoune avec quelques collaborateurs.
C’est dans cette période de la fin des années 1920 que naît le chasseur Dewoitine D.27, commandé par la Suisse et produit sous licence par les Ateliers fédéraux de construction de Thoune. Parallèlement, il est décidé de construire une version simplifiée pour l’entraînement des pilotes, le D.26 équipé d’un moteur Hispano-Suiza de 250 CV, copie sous licence du Wright qui équipait entre autre le "Spirit of St-Louis" de Lindbergh lors de sa traversée de l’Atlantique en 1927.
Le D.26 est un avion facile à piloter avec un moteur très fiable, ce dont les pilotes ont besoin pour passer des lents biplans, héritage de la guerre 14-18, vers l’ère des chasseurs monoplans rapides qui arrivent sur le marché (Messerschmitt Bf-109E, Morane-Saulnier MS406 qui seront achetés par la Suisse à la veille de la 2ème Guerre Mondiale).
Le D.26, comme son grand-frère le D.27, est un appareil à carlingue entièrement métallique dont seuls les revêtements des ailes et du gouvernail sont en toile. L’aile est en position haute, dite "parasol" ce qui lui confère une allure peu commune.
Caractéristiques des Dewoitines D.27 et D.26
Illustration de la technologie des instruments de vol au début des années 1930 (photo SBO).
| D.27 | D.26 |
Année de fabrication : | 1928-32 | 1931 |
Affectation : | Chasse | Entraînement |
Moteur : | SLM Winterthur 500cv V12 | Hispano-Suiza 9Qa9 cyl. en étoile |
Nombre construits : | 81 | 11 |
Envergure : | 10,30m | 10,30m |
Longueur : | 6,56m | 6,72m |
Hauteur : | 2,78m | 2,78m |
Surface alaire : | 17,55m2 | 17,55m2 |
Poids maxi : | 1.414kg | 1.068kg |
Armement : | 1 mitrailleuse, lance-bombes | 1 mitrailleuse |
Vitesse maxi : | 298km/h | 240km/h |
Autonomie : | 1h45 | 3h |
Les D.27 restent en première ligne jusqu’en 1940 puis sont relégués dans un rôle de formation avant d’être ferraillés en 1944. Les D.26 survivants sont donnés en 1948 aux Aéro-clubs pour remorquer les planeurs. Cet avion est le bienvenu car il offre des capacités d’ascension bien supérieures à celles des Piper et autres et permet des doubles, voire triples remorques de planeur. Mais on ne pilote pas cet avion de chasse comme un Piper, d’où la difficulté de trouver des pilotes autorisés par l’OFA. A Genève, plusieurs pilotes « chevauchent » cet appareil (HB-RAI n° 284) : Giulio Beck, Jean Augsburger, Emile Wick, Reto Salzborn, John Dubouchet, Gilbert Kammacher ou Eric Isaac (à Prangins de 1953 - 1955) et P. Spreiter.
Le problème des pièces de rechanges devient néanmoins vite crucial, malgré l’aide du dépôt militaire de la Blécherette (Lausanne). Elles deviennent introuvables ou très chères et les pilotes remorqueurs peu disponibles. Cointrin ne peut plus loger le D.26 qui est vendu à un groupe de vol à voile en Suisse alémanique qui verse une avance mais ne vient jamais prendre livraison de l’appareil. Il est retrouvé et restauré par Eric Isaac de Nyon avec l’aide de l’atelier de mécanique du terrain de Gruyères (FR) et en 1980, le "284" accomplit son 1er vol de vétéran. Il est vendu en 1981 par la veuve de M. Isaac à la FMPA (Fédération du Maintien du Patrimoine Aéronautique, Lausanne la Blécherette) qui le présente depuis régulièrement dans des meetings tant en Suisse qu’à l’étranger.
Il s’agit actuellement d’un des deux D.26 originaux en état de vol en Suisse qui se trouve être le plus vieil avion des Troupes d’aviation suisses encore volant. Le second est le "286" (HB-RAG). Il resterait aussi un D-27 suisse (J-257), qui a d’abord été exposé au Musée des transports de Lucerne puis transféré au musée des troupes d’aviation de Dübendorf, ainsi qu’un D-27 (no.290) volant chez Jean Salis à la Ferté-Alais (F-AZJD) et un dernier exemplaire volant à Duxford.
Le "284" en uniforme militaire, avec des copains.