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Histoire de l’Aéro-Club de Genève (2/5) : de l’école de pilotage à la 2ème Guerre mondiale (1920-1945) [vidéo]

 

Dans l’entre-deux guerres, l’Aéro-Club de Genève vit ses années les plus agréables. Dès 1926, la jeune école de pilotage est le cœur battant du Club qui va à terme démocratiser l’aviation. Naissent alors les disciplines aériennes conjointes : vol à voile, modèles réduits. Sur l’aérodrome de Cointrin, peu encombré, on ne dénombre en 1938 qu’une moyenne de 37 mouvements d’avions et de 44 passagers par jour ! Hélas, la 2ème Guerre mondiale va figer à nouveau toute la dynamique du Club.


Devant le Mont Salève s’étend l’aérodrome de Cointrin avec ses hangars en bois aux toits bombés et son petit territoire recouvert d’herbe (1932). Les avions d’écolage de l’Aéro-Club sont des DH-60 Gipsy-Moth dans une livrée assez semblable aux avions d’entraînement militaires suisses d’alors, complétée d’un liseré aux couleurs genevoises. Le moniteur s’installe à l’arrière, derrière son élève qui fait ici un contrôle pré-vol de l’avion avant sa leçon. Dessin de Philippe Abbet (Meyrin).

Cointrin : un grand terrain en herbe avec plus de plaisirs que de contraintes

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Le petit monoplace Tipsy S.2 (HB-OFO) à moteur Sarolea de 912cm3 (07.1936-12.1937).

La 1ère guerre mondiale a radicalement transformé l’aviation des "sportsmen" en une activité presque lucrative. Après cinq ans sans activité, le Club Suisse d’Avion (CSA), futur Aéro-Club de Genève, renaît de ses cendres avec 40 membres et aucun aéronef en sa possession. Le terrain d’aviation de Collex-Bossy est retourné à la culture, les rares avions commerciaux utilisent celui temporaire de Saint-Georges, près du stand de tir. Un hangar à hydravion apparait en 1921 sur la rive gauche du lac, mais disparait déjà en 1923. L’aéroport de Cointrin naît timidement à la fin de l’année 1920 et St-Georges est abandonné dans le courant de 1921. Les très rares vols de ligne se verront dorénavant et dès 1922 du côté de Meyrin-Cointrin, début d’une formidable croissance.

En 1920, on ne compte en Suisse que quelque 5 avions dits "de sport". Les meetings aériens sont donc assez rares et attirent beaucoup le public. On admirera à Cointrin le saut en parachute (1921) (Récit), une manifestation militaire (1922) (Récit), et un meeting civil en 1925. Quelques aéronautes, à la fois aérostiers militaires, persistent depuis 1909. Ils participent à la Coupe Gordon-Bennett de ballon à gaz de 1921 à 1923. Le Genevois Ansermier est le grand vainqueur de la compétition de 1921 (Récit) et le village de Vernier verra se dérouler la Coupe en 1922 près de l’usine à gaz (Récit). La perte du ballon "Genève" frappé par le foudre lors de Gordon-Bennett de 1923 va terriblement refroidir les ardeurs de ces "plus légers que l’air". Dorénavant, seuls des rallyes "auto-ballon" se verront sporadiquement dans le canton de Genève et ses environs jusqu’en 1939 (Récit).

Une aviation pour les nantis, mais bientôt pour la jeunesse

Le CSA est de par son origine principalement orienté vers l’aviation dans l’entre-deux guerres et non structuré en groupes pseudo-autonomes comme il l’est aujourd’hui. Mais la jeunesse sonne à sa porte avec peu de moyens. De 1923 à 1926, supportés par le club, les adolescents du Junior Avio Club tentent de construire un aviette, appareil monoplan et monoplace léger à moteur de motocyclette, mais sans succès (récit). Fin 1930, de jeunes employés se mettent à fabriquer un planeur-école Zögling qui sera finalement opérationnel en 1933 et le début d’une saga du vol silencieux qui perdure (récit). Le vol à voile développera sa flotte régulièrement acquérant un Grunau Baby (1935), Spyr III (1937), Hutter, S-18 et Karpf (1939) et comptera plus de 40 brevetés. Quant aux modèles-réduits, actifs à Genève dès 1934, ils intègreront le club en 1939 avec une quarantaine de membres qui ne feront qu’augmenter (récit). Le CSA met aussi sur pied à Genève une nouveauté, un Salon européen de l’aviation de sport et de tourisme en 1929 (récit). Son succès amènera une 2ème manifestation en 1934 (récit). Celui prévu pour 1939 n’aura pas lieu, pour cause de guerre.

L’élément d’importance pour la vie du club est l’arrivée du Carougeois Marcel "Noël" Weber à la tête de Cointrin en été 1922. Capitaine des troupes d’aviation suisses, instructeur né, ses responsabilités à l’aéroport, alors "champ d’aviation" ou "aéroplace", lui laissent assez de temps pour former des pilotes (récit). A la demande de l’industriel Frédéric Dufaux, il loue un biplan (1923) et amène Dufaux jusqu’au brevet de pilote. Puis, utilisant le biplan des Genevois Geneux et Ferrière, il forme pour le compte du club quelques pilotes genevois ou étrangers jusqu’en 1927. Dès 1928, le club achète son 1er avion, un Gipsy-Moth, aidé par des sponsors (récit). Ainsi va débuter une école de pilotage reconnue, toujours emmenée par Weber. Edgar Primault l’épaulera en 1930 ainsi que Charles Bratschi dès la fin de 1928, Bratschi que Weber à fait entrer sous ses ordres à Cointrin. Jusque là quelque 5.061 baptêmes de l’air auront été donnés par le Club et les compagnies aériennes invitées, au travers d’un dizaine de Journées populaire d’aviation (1926-30) (Récit).

 

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La flotte de Gipsy Moth de l’Aéro-Club en 1934 survolant Vessy-Genève (CH341, 277, 217).

Un fort engouement local pour le vol à moteur et la vie en 3 dimensions

Dans les années 30, beaucoup d’aspects aéronautiques se sont considérablement développés. Cointrin connait son meeting de voltige aérienne en 1930 (récit) ainsi que la venue mémorable du dirigeable Graf-Zeppelin orchestrée par le CSA (récit). En 1931, trois Anglais y voltigent encore. Ces années sont aussi constellées des manifestations sportives locales internes au club. Les planeurs sont hélas exilés à Gland en 1934 (récit) mais de retour à Cointrin en 1936 où Bratschi est devenu directeur à la fin de 1934. La construction de Pou du ciel débute aussi dans le public (récit). Hélas, la formule de Mignet, sorte d’ULM des années 30, va bientôt être interdite de vol en Suisse, mais certains de ces biplans se construiront encore jusqu’en 1949.

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Une 1ère femme brevetée à Cointrin : Lee Ya-Ching/Tcheng, en 1934.

C’est bien sûr du côté de l’aviation sportive que réside l’activité principale du CSA qui deviendra l’Aéro-Club de Suisse section de Genève en 1933. L’école de pilotage s’enrichit presque d’un De Havilland chaque année (récit). Les appareils à bout de souffle sont régulièrement remplacés, il y en aura bientôt toujours 3 ou 4 prêts à voler, complétés par les appareils en propriété de membres, soit quelque 8 appareils en 1929, 14 en 1933, 18 en 1936, etc. Des rares élèves pilotes de 1928, on passe à 30 élèves en 1930 et 45 sont finalement brevetés dont plusieurs femmes (récit). En 1934 on cumule 83 élèves. Si l’heure de vol en double commande coûte 150F en 1927 (850F actuels), elle baissera jusqu’à 20F en 1936 avec le monoplace Tipsy (150F actuels), ou 70F en double commande. Avec près de 450h de vol par an, le club genevois est le 1er de Suisse sur ce thème en 1929 et 1930.

Cette activité inclue des excursions aériennes en Suisse et France voisine, jusqu’en Auvergne, à Reims ou Montélimar. Quelques rares membres volent jusqu’en Afrique du Nord dès 1932. Un challenge régulier est mené avec l’Aéroclub de Lyon, chez eux ou à Genève, tous les 2 ans depuis 1931. Le concours de précision d’atterrissage, de lancer "de dépêche" en vol sur cible, existe dès 1930. Les pilotes sont eux réunis hors du club en une Amicale dirigée par Weber (1933). En 1934, l’immatriculation des appareils passe de CH-nnn à HB-xxx. Dès 1935 l’aéroclub obtient le droit de réaliser des baptêmes de l’air payants et pour la 1ère fois l’on participe à un meeting aérien à l’étranger, à Viry (Hte-Savoie), pour les 25 ans du club. La voltige aérienne apparait avec l’avion Bücker en 1936. Les célèbres caricaturistes de l’ONU, Derso et Kelen immortalisent les 40 pilotes piliers du club en 1937 (récit). On attend à Cointrin l’existence d’un club-house dès 1935 et l’on créera une chanson tant sa venue sera bien retardée (1950). La piste en ciment de Cointrin, longue de 400m, est terminée en 1936. Les cours IAP donnés par le club pour de futures carrières militaires sont cités dès 1937, avec 4 élèves, et de nombreuses conférences sont données en ville durant 25 ans.

Comme en 1914, le couperet retombe sur l’aéronautique civile et ses pilotes

La crise financière des années 30 pénalise ici aussi l’aéronautique. Si 1.412h de vol son dénombrées au club en 1934, avec plus de 520 membres, elles chuteront sensiblement jusqu’en 1939 atteignant 1.100h environ pour 400 membres actifs ou non. Le déclenchement de la 2ème Guerre mondiale met fin à cette évolution, rationne l’essence et interdit le vol à moteur à l’exception des appareils militaires. Seul choix, faire parfois tourner un moteur d’avion durant quelques minutes pour éviter qu’il ne s’encrasse. Les seuls membres actifs de l’aéroclub seront alors les pilotes de planeurs, catapultés avec un treuil, volant entre Cointrin et la ville de Genève, et les passionnés de modèles-réduits qui bénéficient également de l’intégralité de l’espace de Cointrin jusqu’à l’armistice. Les vélivoles bénéficieront encore de plusieurs stages de vol à voile dans les Alpes dès 1940. Et lorsque des bombardiers B-24 Liberator viendront se poser sur la piste en ciment rallongée et rénovée (1944), des membres du club s’auront s’arranger pour récupérer de l’essence étrangère gratuitement et continuer ainsi leur passion (récit).

Durant cet entre-deux guerre, les méritants présidents de l’aéroclub sont l’aérostier Henri Duaime (1875-1938) en 1920-22, Marcel Weber (1896-1975) en 1923-26 (Biogr.) ; les industriels Maurice Duval (1879-1941) de 1926 à 1937 (Biogr.) et Marcel Devaud (1887-1971) jusqu’en 1945 alors qu’il devient le président central de l’Aéro-Club de Suisse (Biogr). Heureusement, quelques mois après la fin de la guerre, toute l’activité aérienne va reprendre de plus belle… (la suite dans le récit).

 

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Elèves et pilotes du club, de g. à d. : l’entrepreneur Francis Chalut, le Dr Louis Antoine Ramel, Francis Thomas (GB), l’entrepreneur Jean Spinedi, Charles Lecoultre des transports internationaux, Max Romy, le garagiste Max Zenobel, le capitaine Marcel Weber chef de l’école de pilotage, le chef-mécanicien Louis Demaurex, le dentiste Emile Burgener, l’industriel Marcel Devaud, le président du Club Maurice Duval (Perrot-Duval), Franz Drees, représentant de Lufthansa à GE, et le prof de chimie Charles Boissonnas.
Par : Jean-Claude Cailliez
Le :  mercredi 17 juin 2009
  • Pour plus d’information, voir : La Feuille-Volante no.108, de l’Aéro-club de Genève, 06.2009, pp:8-12, ills, à la "Librairie"
  • L’Aéro-Club de Genève entre 1920 et 1945 (diaporama N&b, musical, 04’30’’, 98Mo). Nécessite le plugin QuickTime 7.1.3 minimum.

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