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Alberto SANTOS-DUMONT (1873-1932) : ce pionnier des ballon, dirigeable et avion résida en Suisse [vidéo]

 

En 1906, le Brésilien de Paris Santos-Dumont réalise et pilote les 1ers vols motorisés d’un appareil plus lourd que l’air en public et en Europe. Evénements d’importances, 1er record de vol enregistré par la FAI, démonstrations publiques remportant plusieurs Prix, cette révolution sonne le glas des ballons, dirigeables et annonce les débuts de l’étonnante ère de l’aviation. Les frères Dufaux, 2 Genevois, ne sont pas étrangers à cet exploit. Plus tard, Santos-Dumont viendra également vivre quelques années en Suisse-romande.


L’appareil "canard" de Santos-Dumont, baptisé "XIVbis", réalise à Bagatelle (Paris) le premier vol européen d’un "plus lourd que l’air", équipé d’un moteur a explosion et devant les officiels de la FAI.

Un original, un dandy, une figure du tout Paris, un génie et un mécène

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Alberto Santos-Dumont (1873-1932) par Georges Goursat dit Sem.

Fils d’un très riche planteur de café franco-brésilien, Alberto Santos-Dumont (1873-1932) découvre à Paris le monde des ballons et des dirigeables. Il pratique l’aérostation puis à son tour crée, innove ; peu de choses lui résistent en ce domaine. Il prend alors pour devise "Air et Liberté". Ses ambitions et ses moyens le mettent rapidement à la pointe des hommes de l’air entre 1895 et 1905, en parallèle au développement des premiers moteurs à explosion.

Son changement d’orientation aéronautique s’opère en mai 1905 lorsque les frères Henri et Armand Dufaux (voir : Biogr.) font près de Paris les multiples démonstrations retentissantes de leur "hélicoptère", 1er engin à quitter verticalement la terre à l’aide d’un moteur à explosion et emportant une faible charge (voir : Récit). Ces démonstrations dans la halle à ballons de Saint-Cloud produisent un grand effet sur Santos-Dumont qui imagine dès lors que la motorisation permettra bientôt d’emporter un homme dans le ciel. Il décide aussitôt d’abandonner le concept du ballon dirigeable, il en a construit 14, et s’oriente vers le plus lourd que l’air. Cet autodidacte tente de construire en grand un hélicoptère, mais cela est encore trop tôt. Il n’a par ailleurs peu connaissance des travaux des frères Wright aux USA qui, eux, œuvrent en cachette et cherchent surtout à gagner beaucoup d’argent. Santos-Dumont, lui, réalise souvent ses démonstrations en public, et lorsqu’un procédé fonctionne, il s’interdit de le breveter et, toute sa vie, offrira ainsi au monde le fruit de son travail risqué mais novateur.

L’Aéroclub de France, offre un Prix de 150.000 francs a qui réussira un vol de plus de 100m avec un plus lourd que l’air. Ernest Archdeacon ajoute 300.000F pour les premiers 25m ! Le " Petit Santos" construit alors un objet encore jamais vu en Europe, un avion "canard" : ailerons à l’avant, ailes biplan à l’arrière suivies d’un moteur Antoinette de 24 puis de 50cv. Devant les ailes et le moteur, le pilote sera debout dans un panier d’osier de type aérostier. Baptisé "14Bis", l’appareil est d’abord testé durant l’été au-dessous d’un dirigeable puis se déplaçant sur un câble tendu entre 2 arbres. Le 13 septembre 1906 il effectue un bond de 7m, à 70cm de haut équipé d’un moteur de 24cv. Le 23 octobre, dans le parc de Bagatelle et en public (Bois de Boulogne), à sa 2ème tentative l’appareil décolle franchement sur 60m, à 2-3m de hauteur, et se pose sans casse au bout d’une ligne droite. C’est alors le 1er vol public d’un plus lourd que l’air en Europe ! Les spécialistes sont stupéfaits, ils ont même oublié de mesurer la distance parcourue ! Santos-Dumont remporte la Coupe Archdeacon. Le 12 novembre, au même endroit, 4 tentatives sont répétées. L’une s’effectue à 41km/h et la dernière se traduit par un vol de 220m et de 21 secondes, dument mesurée par les officiels de la FAI et 1er vol d’un avion enregistré par cet organisme (voir : Récit). Santos partagera ses gains avec la population parisienne…

Premier avion au monde de configuration classique : La Demoiselle

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L’exploit de Santos-Dumont du 12 novembre 1906 sur la couverture du Petit Journal.

C’est bien le début d’une nouvelle ère qui s’ouvre. Si aujourd’hui d’autres pionniers de l’aviation de la période 1900-1906 sont sortis de l’ombre entre temps, les autorités françaises d’alors n’en ont pas connaissance et déclarent de bonne foi ces vols comme les premiers à pouvoir bénéficier des deux Prix mis au concours. Ce sont au minimum les vols les plus observés, les plus étudiés et les plus renouvelables constatés jusque là ! On cite en conséquence que le bijoutier Cartier invente dés lors la 1ère monte bracelet pour Santos-Dumont, car un aviateur doit pouvoir lire l’heure sans lâcher ses commandes. La FAI, créée en 1905, inaugure une nouvelle activité : enregistrer dorénavant les records du monde aéronautiques et astronautiques.

En été 1907, Santos-Dumont crée le véritable avion qui préfigure des millions d’appareils à venir : la "Demoiselle". C’est un monoplan à aile haute (10m2) avec son moteur à l’avant à hélice tractrice (16-20cv), équipé à l’arrière d’une dérive et d’ailerons, dont les ailes, à tordre volontairement, ne possèdent pas encore de volets. Non breveté, vendu à bas prix, cet ULM de 1907-08 donnera le ton aux avionneurs de tous poils en Europe. C’est sur ce type d’appareil, en version 35cv, que des pionniers romands ont fait rapidement leurs premières armes : le Genevois Edmond Audemars et le Vaudois Ernest Failloubaz, mais aussi le Français Roland Garros (1910) (voir : Récit). En septembre 1909, malgré l’existence de nombreux appareils variés et l’exploit de la traversée de la Manche par Blériot, la "Demoiselle" à moteur Darracq 30cv, avec 113 km/h, détient toujours le record du monde de vitesse !

Au début 1909 lorsque les premiers brevets de pilotes sont créés, Santos-Dumont reçoit à postériori le no.10, seul brevet au monde ou l’aviateur est en civil, à cheval et l’animal figure en pied, encore une illustration de l’originalité du personnage. En février 1910, c’est la 1ère citation de la présence de Santos-Dumont en Suisse. Il est à St-Moritz où le capitaine allemand Engelhardt et son élève font des essais d’un avion Wright décollant depuis le lac gelé. On le sait, le choix technologique des Wright ne donnera aucun débouché, périmé dès 1908, et avantageusement remplacé par les concepts des appareils européens initiés par Santos-Dumont. Hélas, ce dernier ressent déjà les débuts d’une terrible maladie alors méconnue, baptisée depuis sclérose en plaques, et il quitte l’univers aéronautique.

Quelques années de résidence du côté de Glion (VD)

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La "Demoiselle" du Genevois Henri Rohr a fait ses premiers vols, réussis, en 2006 (GAM, Athenaz, 16 sept.06).

Entre les 2 Guerres mondiales le génial inventeur vient se soigner en Suisse-romande à la clinique Val Mont de Montreux-Glion. Il réside à la Villa Ribaupierre et y demeure de 1927 à 1932. D’un caractère plutôt secret, peu liant, son état est souvent dépressif. Mais il rêve de construire ici sa maison et achète un grand terrain de 3.052m2. Il n’en aura pas le temps et la mort l’emporte rapidement en 1932, à 60 ans et à Sao Paulo, sans que l’on en connaisse les derniers instants. Les exécuteurs testamentaires se Santos-Dumont vont offrir le terrain à la commune de Montreux-Les Planches, qui décline l’offre (1939), puis au village de Glion, qui l’accepte et le cède en 1945 à la Société de Développement du village de Glion. On souhaite alors en faire une place publique dotée d’une fontaine ou d’un monument dédié à l’illustre aviateur.

Ce n’est qu’en 1952 que l’hommage est réalisé, tardif, modeste, voire même critiquable envers le donateur et pour ce magnifique emplacement surplombant Vevey, la naissance du lac et la Riviera vaudoise. "L’oeuvre d’art" se trouve à l’entrée du village, contre le mur latéral du terrain qui est devenu une place de jeu, à l’angle de la route de Caux et de celle de la gare. Une petite fontaine rurale, basse, existait déjà, datée de 1837. On a mis un mur derrière elle et construit la nouvelle fontaine de l’autre côté du mur simplement raccordée à la première. Il est vrai que de chaque côté du mur on ignore qu’il y a une fontaine juste à l’opposé, mais quel manque de goût ! Une aigle stylisé déployant ses ailes surmonte les deux fontaines. Une modeste plaque sans fioritures dit "En mémoire de l’aviateur Santos-Dumont". Hommage au rabais pour un terrain vendu alors 6.000F (env. 40.000F actuels).

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Le très modeste monument-fontaine de Glion (VD) honorant son ex-résidant Santos-Dumont.

En mémoire d’un extraordinaire pionnier du vol à moteur

La fortune et l’intelligence de Santos-Dumont lui ont permis d’être entourés d’homme de valeurs et influents, aptes à mettre en œuvre ses concepts révolutionnaires : Lachambre (ballon, dirigeable), Voisin (aviation), Buchet et Levavasseur (moteurs), etc. d’être aidé par des mécaniciens de qualité, rapides à exhausser les idées débordantes et nouvelles de leur patron tel Albert Chapin. Si l’homme est un peu méconnu aujourd’hui, Santos-Dumont aura malgré tout créé une vingtaine d’aéronefs différents qui apportèrent alors leurs lots d’innovations (ballon, dirigeable, hélicoptère, aéroplane).

La 1ère Guerre mondiale, source de grands progrès technologiques, fera vite oublier les héros d’avant 1914. Mais le Brésil saura donner plus tard à l’aéroport de Rio de Janeiro le nom de ce pionnier et rebaptiser l’une de ses villes du nom de Santos-Dumont. Le portrait de ce dernier y illustra nombre de billets de 10.000 Cruzeiros ou de 100.000 Reis. En France, une belle "Demoiselle" de 1908, que son créateur utilisa, se voit au Musée le l’Air et de l’Espace au Bourget. Plusieurs monuments y rappellent aussi la mémoire de Santos-Dumont (Bagatelle, Neuilly, etc.). Quant à l’’appareil original "14Bis", il n’a pas été conservé, mais une 1ère réplique est essayée lors du 1er Salon aéronautique brésilien, sans succès malgré son moteur récent de 4 cylindres (1973). En 2006, le Brésil et la France on voulu marquer dignement le centenaire du vol original de diverses manières. Une 2ème copie est préparée, propulsée par un moteur moderne (Rotax). Hélas, le vol de 1906 n’a pu être reproduit dans l’Hexagone avec les moyens actuels, un longeron d’aile s’est brisé lors des essais. Par contre une ultime réplique brésilienne a très bien volé dès décembre 2005 …. Quant à la petite Helvétie, elle possède toujours une modeste fontaine en état de marche en l’honneur du pionnier.

 

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Santos-Dumont, pour la 2ème fois, figure sur un billet brésilien, dès 1936.
Par : Jean-Claude Cailliez
Le :  vendredi 29 mai 2009
  • Pour plus d’information, voir : La Feuille Volante de l’Aéro-Club de Genève, No.98, Nov.2006, pp:12-15, ills, à la "Librairie".
  • A.Santos-Dumont et ses "plus lourds que l’air" (n&b, sonore, 2’40’’, 70Mo), nécessite le plugin QuickTime 7.1.3 minimum.

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