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Histoire de l’Aéro-Club de Genève (4/5) : les débuts de l’air moderne (1961-1986) [2 vidéos]

 

Les débuts de l’ère moderne :

La réorganisation de la section et la multiplication des groupes permettent le doublement des effectifs et des heures de vol ainsi que l’intégration de nouveaux types d’aéronefs.

Le combat pour la sauvegarde de ses locaux et de l’écolage à Cointrin enracine le Club pour le 21ème siècle (1961-1986).


Depuis le hangar "H" de l’Aéro-Club, avec un vue sur la tour de contrôle surnommée "Goldorak" (construite en 1984) on voit un avion école AS202 Bravo s’envoler. Au sol un Piper Saratoga est prêt à l’usage alors qu’un Cap-10 est encore abrité à l’intérieur (Dessin de Philippe Abbet)

La forte croissance de Cointrin nécessite une troisième aérogare (c’est l’aérogare actuelle). Elle est construite dans les années 1962-68. Elle implique le déplacement de l’aviation légère de l’autre côté de la piste, vers Mategnin et les actuelles rues Liwentaal et Forestier. Pour l’année 1961, on dénombre à Cointrin 62.000 mvts d’avions et 777.000 passagers. En 1971, ce sont 111.400 mvts, 1.691.000 passagers et en 1986 129.500 mvts et 3.662.000 passagers. De petits meetings aériens vont cohabiter parfois mais sans jamais interrompre le trafic : en 1963, puis pour l’inauguration de l’aérogare (1968), les 50 ans de l’AIG (1970) et les 50 ans de Swissair (1981). La piste en béton mesure 3.900m depuis 1960. La piste "B" en herbe est déplacée face aux arbres de Ferney en 1982. Dès 1985, l’extension de cette troisième aérogare vise déjà à accueillir sept millions de passagers !

La réorganisation des structures de l’Aéro-Club.

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Ambiance de vol sur le terrain de Montricher inauguré en 1971.

Le Club a vécu une croissance trop rapide due à la démocratisation du vol rendue possible notamment par les peu onéreux Piper Cub et le plein emploi d’après-guerre. Les anciennes structures ne sont plus adaptées et une réorganisation s’opère. La Section change deux fois d’intitulé, s’ouvre à de nouvelles disciplines sous la tutelle d’un Conseil du Club. Avant 1960 et la fusion, l’actuel Groupe de vol à moteur (GVM) constituait à lui seul la "Section de Genève de l’AéCS", les groupes de vol à voile et de modèles-réduits étant directement rattachés administrativement à l’AéCS central à Berne. Le Club va pouvoir ainsi passer de 400 à 800 membres, tout en incluant l’emploi de nouveaux aéronefs tels l’hélicoptère, le parachute, la montgolfière, etc.

Cette réorganisation implique d’abord de négocier avec l’OFA et l’AéCS. Il convient de leur fournir dorénavant un "Contrat d’exploitation", tout en négociant avec les responsables des trois groupes. Ensuite il faut amender ou refaire les contrats existants avec le personnel, les fournisseurs, l’Aéroport, la maintenance des appareils, etc. L’année 1962 se veut alors une période de transition pour s’organiser en interne et reprendre les tâches et procédures gérées depuis 30 ans par M & Mme E. Sudan (voir : Biogr.). Il y a notamment la gestion des cotisations à géométrie variable : cotisation locale, centrale, interdisciplinaire, ou d’un membre venu d’un autre canton. Il faut expliquer à chaque membre les changements intervenus. Quant au GVM, jusque-là seul à bord, il a maintenant une autorité supérieure, le Conseil, et partage son Club-house avec tous les autres membres.

Dorénavant, si les groupes exercent leur propre activité (écolage, location d’aéronefs, relations avec les autorités aéronautiques en regard des problèmes techniques), le Club est responsable des relations avec l’extérieur, de la coordination des activités aéronautiques, du développement de la publicité ; il doit également aider les groupes à résoudre les problèmes communs, dont la recherche de terrains et l’obtention de certaines subventions.

De trois à huit disciplines au sein des nouveaux groupes

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Les modélistes sur le terrain de Founex en 1969, proche de l’autoroute (ph. J.P. Zuppiger).

Le vol à voile erre encore sur deux terrains : Prangins (1956-65), Sion (1966) avant de découvrir Montricher (1971) où les vélivoles planent toujours avec bonheur en 2009. Les quelque 60 membres d’origine auront doublé en 1980 et disposeront de nouveaux planeurs : un second Boccian, les Meise, Jaskolka Ka8, Ka6, Phoebus, Rhönlerche, Pilatus B4, soit quelque dix appareils en 1974. Paul Guniat y est moniteur sans interruption depuis 1963, aidé de nombreux autres responsables. Le matériel croît toujours : ASW15, Jantar, Blanik, un second B4, les Elfe, deux DG100, ASW15, Nimbus, ASK21. Les avions remorqueurs se nomment Champion jusqu’en 1971 (HB-UAN), Dewoitine D-26 jusqu’en 1981 (HB-RAI) avant l’arrivée du Piper Pawnee en 1982 (HB-PFW). Parmi les vols planés de qualité, notons un record d’altitude à 5.200m dès 1961, de 5.600m (1976) et de 8.200m (1979) ; une distance de 300 km est atteinte dès 1968, puis 700 km (1978). Plusieurs insignes de diamant sont décernés dès 1974. Marc Dugerdil est nommé champion romand en 1977. Ce groupe s’est depuis intitulé le Groupe Genevois de Vol à Voile de Montricher (GGVVM).

Les modélistes errent eux aussi entre Founex, Bière (VD), la piste circulaire près de l’ancienne aérogare de Cointrin (1966) puis découvrent en 1972 Athenaz (GE) d’où plusieurs péripéties faillirent les chasser et avant qu’ils n’en deviennent les locataires "à bien plaire" (1982). Ils y installent l’ex-caravane des vols de plaisance de Cointrin puis deviendront propriétaires du lieu. La soixantaine de membres a aussi plus que doublé dès 1980. On cite le premier essai de remorquage de planeurs en 1975, le premier hélicoptère radiocommandé en 1976. Quelques Genevois sont déclarés champions romands : Montbarron père et fils, A. Cocconi (1971-76). En 1976, la sécession de seize membres provoque la création de l’ACMC, à Malval. Il n’y a plus assez de place sur un seul terrain pour tous les modélistes qui naissent dans le canton ! Le Groupe de Modèles Réduits (GMR) se nomme aujourd’hui le Groupe d’Aéro Modélisme (GAM).

Au GVM, le premier véritable hélicoptère débarque en 1966 avec son moniteur Jean Baer. L’écolage se pratique à Lully, puis à Sézegnin. Le bruit de l’appareil gêne déjà les riverains ! Le groupe Héli-Genève naît en 1983 mais ne connaitra qu’une brève existence. Six hélicoptères se succèderont jusqu’en 1986. Leur saga ne prendra fin au Club qu’en 2004 (Récit).

Les parachutistes se font connaître dès 1970. Le groupe, d’une dizaine de membres, est fondé en 1972 et présidé par Roger Valuis. Le saut étant interdit autour de Cointrin, ils s’éjectent au-dessus de Bière, Chambéry, Sion et surtout à Yverdon ainsi que lors de meetings aériens un peu partout. En 1980 ils comptent quelque 55 membres. Le manque de terrain dédié à l’écolage et l’officialisation de l’école de paras d’Annemasse entraînent le déclin de ce groupe dont il ne reste que quelques membres en 2009. Le champion genevois de saut d’alors est sans conteste André Bohn. Hors du Club, le parapente est né en Haute-Savoie en 1978, dont Bohn fut l’un des acteurs principaux (Récit).

En 1982, les aérostiers forment un nouveau groupe de 20 membres présidé par Laurent Exchaquet : le Groupe Aérostatique Genevois (GAG). Ils comptent 12 pilotes, sept montgolfières de 480 à 3.000m3 et organisent rapidement les manifestations du Bicentenaire aéronautique (1983) et la Coupe Gordon-Bennett (1985). Ils organiseront encore cette Coupe à Genève en 2009. Parmi eux, Patrick Kearley devient une première fois champion suisse en 1983.

La voltige aérienne, pratiquée en Bücker-131 de 1936 à 1975, et longtemps interrompue, reprend. En 1982, après un cours donné par J.P. Besson à Lons-le-Saulnier, il y a achat d’un avion CAP-10 (HB-SAT) et formation du sous-groupe du GVM nommé Aéro-Voltige (1984). René Piccand est champion suisse "Espoir" en 1984 et Jan Olfors le devient en 1987 (Récit). Quant aux velideltistes, ils semblent s’intéresser au Club (1978) avant de créer une fédération suisse distincte. Enfin l’ULM, après avoir connu quelques années de croissance, est interdit de vol en Suisse en 1983.

Concernant le vol en montagne, des cours de pilotage sur glaciers sont donnés depuis 1958 par Henri Golaz. Si le 10ème cours a lieu en 1968, le 30ème se tient en 1986 et quelque 61 élèves "haut de gamme" ont ainsi été formés. Golaz reçoit le "Diplôme Tissandier" de la FAI en 1981. Déjà en 1972, il avait été envisagé de créer un Groupe de Pilotes de Montagne (GPM) avec l’emploi du Piper Super-Cub du GVM. Mais ce dernier veut, hélas, se séparer de l’avion (HB-OPF) parce qu’il vole peu, malgré les cours glaciers, et coûte donc cher. Le GVM refuse d’ailleurs la création du GPM (1982). L’affaire finit au tribunal où un arrangement est trouvé. Le GPM naît et regroupe une poignée de membres sous la présidence de Jean Mabilia. Il est actuellement le plus actif groupe du genre dans toute la Suisse.

Et pourtant, la réorganisation est née au sein du GVM

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Une montgolfière du GAG au gonflage.

Charles Stern, le rénovateur, breveté pilote en 1955, préside le Club réorganisé (1961-64) puis le GVM (1964-70). Michel Favre (71-81) et Daniel Rytz (82-85) lui succèderont au GVM. Cette réorganisation entraîne la nomination d’un chef-moniteur : Jean Baer (1963) engagé ensuite par l’Etat pour piloter l’hélicoptère de la Sécurité-civile (1971). La monitrice de vol (1969) Arlette Borradori devient alors la cheffe-pilote du GVM de 1971 à 2007, un record de longévité, un record de Suisse, un record féminin et une carrière exceptionnelle entièrement dédiée à l’aviation légère. De cinq moniteurs permanents à la base, la moyenne du GVM passe à 15, puis, dès 1970, l’ensemble du Club regroupe une cinquantaine d’instructeurs titulaires, auxiliaires, etc., dont certains dédiés aux seuls cours IAP. Au GVM, selon les années, on compte de 50 à 80 élèves, dont 25 à 30 sont brevetés. Un à quatre cours IAP par an peuvent concerner jusqu’à 35 élèves. A l’intérieur des locaux, l’appareil simulateur Link-trainer, acheté à l’AVIA en 1965, est modernisé en 1977.

La flotte de dix appareils grimpe à 15 en moyenne, surtout de marque Piper mais incluant aussi deux Morane-Saulnier, un Jodel. Les derniers Cub sont en vente en 1968. Deux Bigles Pup se dédient à l’écolage (1972-74). Un premier AS202 Bravo, prêté, est testé en 1974 et sera acheté en 1976. Quelque sept Bravo seront finalement employés jusqu’à nos jours. Une courte tentative est faite avec un bimoteur (1975-76). Le succès des vols de plaisance (1961-65) génère des disputes avec la concurrence, dont Air Léman. Ces vols cessent durant sept ans, avant de reprendre en 1973. Jusqu’en 1982, une caravane placée en bord de piste abrite alors les pilotes faisant passer les baptêmes de l’air. Viendra ensuite la concurrence d’Air Glaciers, etc. Des vols sont organisés pour Coop et/ou Migros dès 1983. Globalement, les heures de vol s’établissent à 2.050h en 1961, 3.400h (1973) et cumulent à 4.400h, dont 1.500 à 2.500h d’écolage. Avec les chocs pétroliers, le prix de l’essence passe de Fr. 1.18.- (1979) à Fr. 1.58.- (1983). A bord des avions, le "transponder" devient obligatoire en 1982.

Comme chaque année, le concours d’atterrissage d’automne, pratiqué sur la piste "B" (gazon) récompense les meilleurs pilotes. On note aussi l’étape à Cointrin de six Rallyes intercontinentaux, alias Rallyes de Genève (1968-76). Les sorties aériennes sont fréquentes vers les cantons et départements limitrophes, vers la Méditerranée. Mais surtout, les grands voyages débutent en 1972. Plusieurs avions sous la houlette d’A. Borradori, s’envolent pour le Cap Nord (1973 & 83), l’Afrique du Nord (1975-76), la Tunisie, la Finlande (1981), le Portugal (1981), le Sénégal (1984), le Maroc (1985), Leningrad (1986) où ils sont les premiers appareils civils non commerciaux depuis la guerre ! (Récit). Le GVM fête ses 25 ans en 1986 sur la piste "B" de Cointrin.

Et comme si tout cela n’était pas suffisant…

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Le 10ème Cours-glaciers en février 1969 en Valais, avec les HB OLX, OPF, OPV, ORN, ORZ, OLX, etc. (Aero-Revue).

Au sol, les locaux de Mategnin, construits en 1964, sont inaugurés en fanfare en 1965. En 1966 se crée la Société Anonyme de Transport Aérien (SATA) sous le triumvirat de Charles Jacquat, Raymond Lambert et du Club (Voir : récit). Les parts du Club seront rachetées ultérieurement par Michel Favre. La compagnie existe jusqu’en 1978 puis deviendra la CTA, avant d’être phagocytée par Swissair. Dès 1972, les avions privés sont déménagés au Centre d’Aviation Légère (CAL) et la totalité du hangar "H" est destinée au Club. Ce dernier est cambriolé en 1974 et son coffre-fort emporté ! Le Club-House, sis à l’extrémité de la terrasse de l’actuel Aéro Bistro, proche de la piste, est inauguré en 1975. En 1976, la piste en gazon est éloignée de celle en béton puis, en 1982, mise face aux arbres ferneysiens. La buvette s’ouvre en 1977, équipée d’un téléphone ! La première et modeste informatisation du GVM intervient en 1976. La buvette reste ouverte le week-end dès janvier 1984 et une pétition des riverains veut interdire le mur antibruit qui voit finalement le jour, avec le parking gratuit attenant tel qu’on le connait de nos jours. Le magazine la Feuille Volante parait assez régulièrement depuis 1971 avec quelque 50 éditions jusqu’en 1986. La cotisation au GVM de Fr. 35.- en 1961 passe à Fr. 70.- en 1968, Fr. 120.- en 1971 puis Fr. 145.- en 1983. Voilà pour les coulisses.

Mais ce n’est pas tout. En raison du projet aussi fou que secret d’une seconde piste en béton sur Collex, reliée à Cointrin, parallèle à la première et en baïonnette, le Club est menacé d’une interdiction d’écolage dès le 1er avril 1968. C’est en 1969 seulement que la presse révèle au public ce projet mal ficelé (voir : Récit). Aussitôt se créent des associations de riverains qui y sont opposées : ARAG et AGRAG. Mis en demeure dès 1967, le Club recherche activement un autre terrain, tant dans le canton de Genève que sur celui de Vaud, à Prangins, au pied du Jura, mais aussi en France (Ain, Hte Savoie), avec l’appui des autorités au plus haut niveau, sans succès. La première date d’échéance est repoussée à fin 1970, puis l’idée de déménagement est finalement abandonnée : il n’a jamais été trouvé d’autre solution ! Malgré toutes ces péripéties les 440 membres de 1961 ont doublé grâce aux nouveaux groupes et au développement des activités du Club tant globalement qu’au travers de ses divers terrains : Montricher, Athenaz et, bien sûr, Cointrin.

Dénommé " Section de Genève de l’Aéro-Club de Suisse" en 1961, rebaptisé "Aéro-Club de Genève" en 1980, le Club réussit à former des structures valides qui ne vont plus changer durant les 25 années suivantes, même si parfois certains pensent que le GVM semble piloter l’ensemble grâce à sa forte majorité de membres. Durant cette intense période de rénovation, les méritants présidents de l’Aéro-Club sont l’industriel Charles Stern (1914-1976) de mai 1961 à avril 1964 (Biogr), l’ingénieur civil François de Coulon (1902-1968) d’avril 1964 à juin 1966 ; le pilote et garagiste Henri Golaz (1912-1996) de juin 1966 à juin 1970 (Biogr.), l’expert comptable Claude Claudet (né en 1927) de juin 1970 à avril 1975, l’avocat Jean-Pierre Reber (né en 1932) d’avril 1975 à fin 1982 et le dentiste Hughes Boillat (né en 1939) de 1983 à mars 1987. (La suite dans le récit).

 

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Debout Georges Gorgerat et le Hughes HB-XCR de l’AéroClub (juillet 1970).
Par : Jean-Claude Cailliez
Le :  mardi 1er décembre 2009
  • Pour plus d’information, voir : La Feuille Volante no. 110, magazine de l’Aéro-Club de Genève, décembre 2009, pp:9-13, à la "Librairie".
  • [10.2009] L’Aéro-Club de Genève entre 1961 et 1986 (diaporama n&b, musical, 640x480pixels, 5’19’’, 127Mo). Nécessite le plugin QuickTime 7.1.3 minimum.

    - Le Cessna HB-CMO vola pour l’Aéro-Club de 1964 à 1979. Il est retiré des registres en l’été 2015 :

    [04.2016] Le Cessna 172E Skyhawk HB-CMO en vol de Cointrin à Planeyse, en couleurs (1965) (vidéo musicale, 02’24’’, 47Mo). Images de Raymond Brussino. Format QuickTime 7.5 minimum.

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