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Quand Robert Stierlin participe à la naissance de l’hélicoptère de sport et de loisirs (1964) [4 vidéos]

 

Dans les années 60s, l’onéreux hélicoptère n’est pas encore dédié au monde privé. Pourtant Robert Stierlin construit son 4ème appareil, toujours pour un prix dérisoir. A nouveau vainqueur d’un concours français d’aéronautique, il ouvre la porte de l’ère de l’hélicoptère de sport et de loisirs en été 1964.


Le populaire 40cv de Stierlin en vol au-dessus de Chavannes des Bois (08.1965). Avec son moteur hors-bord de 20kg, et ses qualités de vol, il fait rêver de nombreux aviateurs et amateurs. Cet appareil est aujourd’hui exposé au Musée des Transports de Lucerne (coll. privée).

Quand aéro et nautique donnent un hélicoptère léger

Parallèlement aux innovations technologiques réalisées sur son troisième hélicoptère (RS-65), Robert Stierlin achète, dès 1960, le moteur d’un futur hélicoptère, celui que chaque amateur européen rêvera finalement de posséder ou de construire. Il a maintenant les capacités de réaliser entièrement et seul un hélicoptère, y compris en soudure aéronautique. Cette liberté d’agir, sans associé, portera également ses fruits. A l’Organisation Européenne de Recherche Nucléaire (CERN), il compte parmi ses collègues et amis plusieurs mordus d’aéronautique dont Marcel Sartorio (1923-1996) et Daniel Bois (1930-2008), parmi d’autres qui l’aideront occasionnellement. En 1964, à 38 ans, il y reçoit le titre d’ingénieur-mécanicien.

Dès 1962, dans son garage de Cointrin (Corbillettes), il entreprend la réalisation d’un petit hélicoptère qui lui prendra quelque 1.550 heures de travail sur trois ans. Cet hélicoptère connaîtra deux versions, l’une, tripale, qui ne sera pas testée en vol (1963), la seconde, bipale, qui volera à la fin 1964. Sa première originalité est l’emploi d’un moteur hors-bord léger (500gr par cheval de puissance), dont le refroidissement originellement assuré par l’eau ambiante doit être réalisé autrement. Les fabricants de moteurs de bateaux s’intéresseront à cette réalisation qui ouvre peut-être de nouveaux débouchés.

En hiver 1963-64, la version tripale, est presque terminée, montée sur ses trois roues, mais le refroidissement du moteur est insuffisant. Elle prend aussi trop de place dans le garage et il faut démonter le rotor à chaque fois que l’on range l’appareil. Stierlin préfère revenir au bipale qui est aussi moins lourd. Pour le reste, on ne change pas une technique qui fonctionne bien.

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Le 40cv va décoller de Chavannes-des-bois (Vaud) Stierlin est aux commandes ; Daniel bois lance le moteur hors-bord "à la ficelle" (coll. privée).

Le rotor bipale est stabilisé par la célèbre barre gyroscopique Les précédents hélicoptères de Stierlin utilisaient une version améliorée de la barre gyroscopique de Bell, constituée principalement de deux demi-bras reliés par un berceau entourant l’arbre du rotor, et placée au-dessous (Merlin) ou au-dessus (RS-65) du rotor. Ici, la barre, plus simple et plus légère, est d’une seule pièce, en bascule, traversant l’axe du rotor à son sommet, également au-dessus des pales.

Les premiers essais au sol se déroulent en juillet 1964 à Chavannes-des-Bois, résidence secondaire de Stierlin, où il a coulé une dalle circulaire lui servant d’héliport. Le premier vol aura lieu en octobre, pour ses 38 ans. Les tests se déroulent jusqu’à fin novembre, puis reprennent de février à juillet 1965. L’appareil est manifestement bien né, fiable et maniable. Sans compter les 1.550 heures de travail, le coût du matériel utilisé se monte à 3.700 francs, dont 1.470 pour le moteur. De nouveau, cela représente l’équivalent de deux de ses salaires bruts (1962). Des contacts sont rapidement pris avec L’Office Fédéral de l’Air et l’expertise/immatriculation se déroule à Prangins en été. Le X-HB-XVB va pouvoir courir la campagne et les meetings.

Où l’ère de l’hélicoptère de loisir naît en Europe

Le Réseau du Sport de l’Air (RSA) est né en France avant-guerre et en Suisse en 1964, où il comptera une centaine de membres dès 1967. Stierlin fait partie de ses animateurs, responsable notamment de la certification technique des divers aéronefs construits par des amateurs. Il participera avec son petit hélicoptère 40cv à sept meetings du RSA. L’hélicoptère se démonte pour le transport, la queue et les pales vont sur le toit, la cellule entre dans une Renault-4L. Il suffit d’une heure pour le rendre opérationnel !

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L’hélicoptère entre intégralement dans une Renault-4L, sauf le rotor et la queue fixés sur le toit (Photo J.P.Sartorio, 08.1965).

En août 1965, Stierlin se rend au meeting RSA de Montluçon (F). Laissons parler les auteurs de la vingtaine d’articles qui suivront, du Figaro à la revue spécialisée, et jusqu’aux USA. "ll a été considéré comme le plus intéressant des 81 aéronefs présents" (P.Lambermont). "Du point de vue du jury, un seul appareil était qualifié cette année, l’hélicoptère monoplace construit par un amateur suisse, Robert Stierlin [...] Une montre suisse de grand format." (Flight International). "La révélation de ce rassemblement était évidemment le remarquable hélicoptère de M. Stierlin de Genève, qui a conçu et réalisé une machine de grande classe tant par l’originalité de sa construction que par la réalisation irréprochable [...] et pour un coup d’essai ce fut un coup de maître" (Aviation Magazine). "Construction amateur absolument époustouflante de qualité, de précision et de présentation. L’ingénieur Delacroix qui était présent a été de son propre aveu, fortement impressionné par la qualité de fini et de sérieux des machines présentées, notamment par l’hélicoptère de Stierlin" (Aviasport). Etc..

Stierlin remporte le premier prix, hors concours, loin devant 19 prototypes et gagne la coupe de la ville de Montluçon. Le rêve d’hélicoptère individuel est rentré dans l’esprit des amateurs, l’ère européenne de l’hélicoptère de loisir naît à Montluçon. Dès cette époque, Stierlin reçoit des demandes de plusieurs continents pour commercialiser son appareil, en acheter les plans ou pour venir le voir à Genève. Hélas, il doit répondre à tous qu’il n’y a ni plans, ni production prévue et qu’il l’avait construit par pur hobby individuel ! Plusieurs membres du RSA en Europe vont alors se lancer dans la construction de leur propre hélicoptère et se faire conseiller par Stierlin.

L’appareil se produit dans 5 meetings en Suisse où la presse, muette, ne sait pas reconnaître le caractère intéressant de sa réalisation : à Bex, les 8/9.07.1967 (34’ et 26’ de vol) ; à Ecuvillens, les 3/4.09.1966 (27’), les 2/3.09.1967 (10’) et le 31.08.1968 (21’) ; à Gruyère, le 1.09.1968 (22’). Certains lecteurs ou spectateurs le retrouveront peut-être dans leurs albums-photo. Après le meeting d’Ecuvillens de 1966, Stierlin vole aux Ponts-de-Martel où il pratique des tests en altitude et fait la connaissance de René Jaggi.

Avec les félicitations de connaisseurs

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Un beau vol sur le terrain d’Ecuvillens lors d’un des meeting de 1966 (coll. privée).

Par confort, un siège de karting remplace l’ancien siège fait main. En août 1968, Stierlin se produit au meeting RSA de Grenoble-le-Versoud (19’ et 27’ de vol). Le temps n’est pas bon, il y a des bourrasques de vent et de pluie, il vole malgré tout alors que le public se réfugie sous la tente et regarde à peine. Après être monté assez haut il descend en auto-rotation et redémarre au raz du sol. Sa démonstration est magnifique. Il reçoit les félicitations de Georges Héreil, patron de Sud-Aviation (père de l’avion Caravelle), pour avoir fait voler gracieusement son hélicoptère avec un moteur de bateau. L’appareil compte maintenant quelque 60 heures de vol et aussi bien pour lui que pour Stierlin, ce sera leur dernière apparition publique.

Stierlin n’avait pas d’autre ambition que celle de se construire son propre appareil pour un usage individuel, dans sa propriété. Mais il lui restait au moins un rêve à réaliser, construire un biplace pour faire partager sa passion à ses amis, en vol (voir : Récit).

- L’hélicoptère Stierlin RS-40 est exposé au Musées des Transports et de la Communication de Lucerne.

- L’hélicoptère genevois de la Sécurité civile "Rega-15", entre 1990 et 2003, portant également l’immatriculation HB-XVB a été baptisée au nom de Robert Stierlin en mai 1999.

 

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A Ecuvillens le week-end des 3 et 4 septembre 1966.
Par : Jean-Claude Cailliez
Le :  mardi 12 juillet 2005
  • La carrière de R. Stierlin a été traitée dans le magazine Hélico-Revue Nos.43 (1999), 44 et 45 (2000). Voir aussi le magazine de l’Aéroport de Cointrin "23-05" no.20 de juillet 1999 et le journal de la commune de Meyrin "Ensemble" no.20 de mars 2001.
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    [05.2007] Tout sur le RS40, 1963-1968 (couleur, muet, 3 parties de 8’22’’, 8’02’’, 9’41’’, ≈304 +≈260 +≈339Mo), nécessite le plugin QuickTime 7.1.3 minimum. Ne pas hésiter à laisser "downloader" un peu les vidéos avant lecture !
    [03.2012] Robert Stierlin en images, 1955-1969 (II/II) (diaporama, 02’50’’, 6Mo). Format MP4. Encore Visible Ici.

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